Mon métier ? On n’a pas de mission précise en fait. « Accompagner » les élèves en situation de handicap c’est ce qui est écrit, mais on peut très bien se retrouver à faire du secrétariat, de la surveillance... Dans notre contrat de travail, quand on voit nos missions, c’est hyper large ! On n’a pas de tâche définie. On peut nous faire faire du secrétariat et on ne peut pas dire non puisque notre contrat ne dit pas ce qu’on doit faire.
A la fin de l’année dernière, on a fait une réunion avec Mme B [pilote du PIAL]. On a parlé des élèves que chacun préférait continuer de suivre, mais à la rentrée, trois d’entre nous se sont retrouvé.e.s avec d’autres élèves, qu’on ne suivait pas auparavant. Ça a chamboulé les élèves, et nous aussi.
Entre nous, on était tou.te.s d’accord mais le jour de la rentrée, tu reçois ton emploi du temps et tu te rends compte que ce n’est pas du tout ce que tu voulais. C’est une autre AESH qui s’occupe des élèves que je suivais l’an dernier, pareil pour les autres d’ailleurs. On n’a pas su pourquoi. On nous dit que c’est à cause des emplois du temps des élèves, mais c’est lié à mon emploi du temps : je travaille dans deux établissements. Si j’accompagne un élève 15 heures ici, mais que je dois assurer 15h auprès d’un autre élève qui se trouve dans un autre établissement, comment est-ce que ça peut marcher ? Donc cette année, j’accompagne trois élèves au collège, et un quatrième à l’école. On nous propose de faire des voeux mais ils ne sont pas pris en compte. On arrive et on nous dit : « tu auras tel ou tel élève » et « tu seras dans tel établissement ».
Mon deuxième établissement est une école primaire. Elle n’est pas si loin mais en additionnant le temps de rassembler mes affaires, de quitter le collège, de faire le trajet, parfois de repasser chez moi pour récupérer des affaires, j’ai vingt-cinq minutes pour manger, maximum.
Vous êtes « placé » sur différents établissements, et en plus vous avez plein d’élèves. Il est impossible d’assurer un suivi qui te permettrait réellement de les aider : si tu en accompagne un en cours de maths, mettons une heure par semaine. La semaine suivante, tu t’assoies à côté de lui et tu te rends compte qu’il n’a rien compris aux trois heures précédentes où tu n’étais pas, et là il faut tout rattraper. Pire : au début de l’année, on n’a même pas accès au dossier MDPH des élèves qu’on suit.
On vous dit à la rentrée de suivre des élèves dont on ignore les troubles. On ne sait pas ! Parfois les professeurs viennent nous voir pour se renseigner, savoir ce qu’il faut mettre en place pour l’élève. Là on se regarde... Personne n’a l’air de savoir. Du coup il faut se débrouiller, apprendre sur le tas. On arrive aux côtés de l’élève et petit à petit, on essaye de comprendre ce dont il a besoin, ce qui « ne va pas ». On perd beaucoup de temps.
Pour le suivi au fil des années c’est pareil : qu’est-ce qui a été mis en place à l’école primaire ? Est-ce que ça a aidé l’élève ? Est-ce qu’il faut continuer quelque chose ou au contraire s’adapter différemment ? Changer certaines choses ? Tu ne sais pas. Moi, je suis la « plus nouvelle » des AESH ici, et je ne pensais pas du tout que ce serait comme ça. On ne vous dit rien. Débrouille-toi ! On te donne l’élève, tu y vas, et tu te démerdes. Comment veux-tu aider l’élève ? On a l’impression qu’en fait le métier c’est simplement de faire de la surveillance. C’est triste.
Est-ce que je recommanderais le métier à quelqu’un ? Ce métier est gratifiant dans le sens où tu as l’occasion d’aider des plus jeunes qui sont dans des situations compliquées, de transmettre ton savoir également ; mais les points négatifs pèsent trop lourd : le salaire ne suit pas, tu n’es pas considéré et tu dois te débrouiller.