Déclaration intersyndicale commune FSU 93 - CGT Educ'action 93 - SUD éducation 93, Formation Spécialisée Départementale du 6 février !
Monsieur le Président de la FSSSCT-D,
Mesdames et Messieurs les membres de la FSSSCT-D,
Cette instance dédiée à la santé et à la sécurité des personnels et des élèves en Seine-Saint-Denis n’est pas détachée du contexte politique grave que nous rencontrons.
La débâcle démocratique et institutionnelle provoquée par les décisions d'Emmanuel Macron rend plus profonde encore la crise que traverse l'école depuis plusieurs années.
Nos conditions de travail se sont tellement dégradées (et nous allons le voir à travers toutes les situations évoquées lors de cette FSSST-D) et les salaires sont si bas que le ministère peine à recruter : il manquait au moins un·e enseignant·e dans la moitié des collèges et lycées en septembre et 1500 postes n'étaient pas pourvus à l’issue du concours 2024 de professeur·es des écoles.
Après le passage éphémère d’Anne Genetet, c'est Élisabeth Borne qui a été nommée ministre de l'éducation nationale. Cette dernière a laissé un très mauvais souvenir par la façon dont elle a imposé la réforme des retraites à coup de 49-3. Elle s'est permise de déclarer dès son discours de passation de pouvoirs qu'elle n'était pas spécialiste de l'éducation nationale. Une manière de plus de démontrer à quel point l'école n'est pas la priorité de ce gouvernement ! En atteste également la manière dont Madame Borne a tourné le dos à deux enseignants de Mayotte qui l’interpellaient sur la situation catastrophique que les élèves et les collègues vivaient, quelques jours après le passage du cyclone.
Les projets de PLF et PLFSS du gouvernement Barnier, abandonnés avec la censure en décembre dernier, étaient une énième provocation à l’encontre de l'ensemble de la population, et donc de nos élèves, mais aussi des enseignants·es de l’école publique. Après des semaines de discussions, le budget est adopté après un nouveau coup de force via le 49-3 : les 2 jours de carence supplémentaires, les 4000 suppressions de postes, le DNB barrage pour entrer en seconde et les groupes de besoins en 4ème/3ème ont été abandonnés. Doit-on
pour autant se réjouir ? Ces annonces sont à mettre au crédit des mobilisations des collègues et des alertes syndicales mais nous sommes pourtant encore loin du compte. En outre, la baisse de l’indemnisation des congés maladie des agent·es public·ques devrait être maintenue. À l’heure où les risques psycho-sociaux et les conséquences du néomanagement public se font sentir avec plus de force dans nos établissements, le gouvernement fait donc le choix conscient et assumé de punir les malades. L’école va mal, ses agent·es aussi
– en témoignent la multiplication des signalements de souffrance au travail via la FSSSCT – et alors que la crise de recrutement bat son plein rien n'est fait pour préserver les personnels déjà en poste.
Pour les élèves comme pour les enseignant.es, c’est donc la règle du marche ou crève qui s’applique, dans une impudence insupportable de notre ministère. Il est indispensable de rappeler qu’il faudrait créer 10000 postes dans le second degré à l'échelle nationale pour retrouver le taux d’encadrement de 2017. Pour le 1er degré, la France reste encore très au-dessus de la moyenne du nombre d’élèves par classe des pays de l’Union européenne. Pour rejoindre cette moyenne de 19 élèves par classe, il faudrait créer près de 26 000 postes.
Rappelons que d’autres choix budgétaires que l’austérité et le sacrifice des élèves comme des agent·es sont possibles – notamment en adoptant une meilleure répartition des richesses et des profits.
L’École publique, aujourd’hui, tient par un fil : celui de l’engagement des personnels. Mais il serait irresponsable et cynique de ne compter que sur les agent.es pour pallier les graves manques structurels et financiers auxquels nous faisons face. Il est impératif que des actes forts viennent compléter les discours pour enrayer une situation devenue critique.
A une politique d'austérité s'ajoute une politique raciste. Dans une récente circulaire, le ministre de l'intérieur, Bruno Retailleau, donne aux préfets des consignes fermes de non-régularisation des personnes étrangères vivant en France sans titre de séjour. Nous avons appris avec stupeur que le 22 janvier des gendarmes ont interpellé une élève dans l'enceinte de son collège de Maizières-lés-Metz. C'est une atteinte directe aux droits fondamentaux de l'enfant et au droit de l'éducation. D'ailleurs cela a été rappelé par la rectrice à tous les établissements fin janvier. Alors que beaucoup de nos élèves étrangers ne peuvent étudier dans des conditions sereines car ils et elles doivent faire face à des démarches administratives très lourdes et subissent des temps d'attente de réponse extrêmement long de la part des préfectures, ils et elles ne sont maintenant plus en sécurité dans nos établissements scolaires.
Face à une telle politique, nos conditions de travail et les conditions d'apprentissage des élèves se dégradent.
Depuis septembre, de trop nombreux exemples d'établissements en très mauvais états sont venus nous rappeler qu'il est dangereux pour nos collègues d'enseigner et pour nos élèves d'étudier : des écoles ont été inondées à Aubervilliers, le plafond (dalles et structure) s'est complètement effondré dans une salle du collège Roger Martin du Gard à Epinay sur Seine, des faux plafonds tombent pendant les cours et des infiltrations d'eau font courir des risques évidents d'incendies au lycée Utrillo de Stains. Enfin, nous n’oublions pas le drame qui s'est déroulé au collège Joliot Curie de Stains : une collègue a été hospitalisée en urgence suite à la chute d'une fenêtre. Cela nous rappelle que nos collègues et nos élèves sont en danger grave et permanent dans ces établissements délabrés.
Et à chaque fois, le danger grave et imminent n'est jamais reconnu. Et à chaque fois, nous actons des mesures dont les mises en œuvre sont incertaines, parfois jamais effectives. Quand allez-vous décider de protéger réellement les personnels ?
Quand ce ne sont pas les locaux vétustes qui mettent nos collègues en danger, ce sont parfois les personnels de direction qui usent d'un management brutal. La liste serait très longue à faire ici et vous êtes en possession de tous les éléments, y compris du triste historique de certains personnels de direction. Face à ces situations étayées dans de très nombreuses fiches du RSST, nous demandons à l'administration de réagir au plus vite et de rappeler aux personnels de direction concerné.es qu'ils et elles sont responsables de la sécurité des personnels dans leur établissement d'après l'article 8 du décret n°85-924 du 30 août 1985. Il n'est ni admissible ni envisageable que dans ces situations ce soit les collègues qui, via une enquête administrative ou sur la base de rapports scandaleux, fassent l'objet de mesures disciplinaires réelles ou déguisées, comme une mutation dans l'intérêt du service. Quand allez-vous ouvrir les yeux, convoquer et sanctionner des chef·fes d'établissement dont la toxicité perdure années après années, parfois établissements après établissements ?
Dans le 1er degré, les signalements liés à l'accueil des élèves à besoins éducatifs particuliers se multiplient. Le manque de formation, de moyens matériels et humains dégradent les conditions d'accueil des élèves et les conditions de travail des collègues.
Face à toutes ces attaques gouvernementales et à des conditions de travail de plus en plus dégradées, l'intersyndicale SUD-EDUCATION 93, CGT 93 et FSU93 est en ordre de bataille pour défendre les droits des collègues à travailler en sécurité et dans des établissements dignes. Nous continuerons à rappeler à l'administration sa responsabilité dès que l'une ou l'un d'entre nous se retrouve en situation de souffrance au travail. Nous continuerons à nous lever très tôt pour accompagner les collègues dans l'exercice d'un droit de retrait lorsqu'ils auront un motif raisonnable de penser qu'iels sont en situation de danger grave et imminent.
Notre intersyndicale vous l'a rappelé lors du CSA-SD spécial DHG : vous semblez vous préoccuper de nos conditions de travail mais à quoi bon aborder cette question tant que les effectifs sont aussi élevés dans les classes, tant que les murs s'effritent, que les plafonds s’effondrent sur les élèves et les collègues, tant qu'il n'y a pas assez d'AESH, d'AED, de CPE, d'infirmières, de PsyEN, de médecins scolaires ? Nous sommes contraint.es de ne faire que de la prévention tertiaire et tentons d'aider les personnels en burnout, en troubles
anxio-dépressifs, en situation de danger grave et imminent à cause du bâti ou des risques psychosociaux. Nous empilons les fiches SST sans pour autant voir les situations évoluer. L’éducation nationale rencontre un problème structurel, systémique dont les effets sont décuplés en Seine-Saint-Denis. Nos revendications pour l’École, pour ses personnels, pour ses élèves, pour toute la société ont une boussole : faire grandir et réussir tous les élèves ensemble, avec des personnels respecté·es, reconnu·es et en sécurité sur leur lieu de travail.
Nous continuons pour cela de réclamer avec force et détermination un plan d’urgence pour le 93. Nous ne lâcherons rien !