Ces derniers jours se sont multipliées des déclarations des ministres de l’Éducation Nationale, et de l'ESR. La ministre de l’ Éducation Nationale amalgame laïcité, meurtre de Samuel Paty et soutien au peuple palestinien, suivi par un intense matraquage médiatique. Le 4 octobre, le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, invoquant les principes de laïcité et de neutralité,tente de restreindre la liberté d’expression politique des étudiant·e·s et personnels sur des sujets de justice et de solidarité internationale, sujets sans lien avec la laïcité et encore moins avec la neutralité à laquelle ne sont pas du tout soumis les étudiants.
Une fois encore, la laïcité est explicitement utilisée comme un instrument de répression, contre les mouvements sociaux en soutien à la Palestine et au Liban - dont on se demande bien quel est leur rapport avec la religion - et contre toute expression des élèves, familles et personnels musulman·es ou perçu·es comme tel·les.
Au nom d'une prétendue lutte contre l'antisémitisme, affichée comme une priorité par le gouvernement, les ministres et autres éditorialistes affichent de plus en plus souvent un racisme totalement assumé, envers les élèves et familles musulman·es ou perçu·es comme tel·les. Parler et agir ainsi, c'est nier la participation de la France, de ses institutions et partis politiques, dans la construction de l'idéologie raciste, notamment antisémite, et sa mise en œuvre génocidaire et coloniale. L'opposition entre Juifs·ves et autres groupes non-blancs, vieille arme de l'État colonial, ne fait que nourrir l'islamophobie et l'antisémitisme en isolant d'autant plus les Juifs·ves, notamment de Seine-Saint-Denis, des solidarités dont iels pourraient bénéficier dans ce contexte de montée des racismes et de l'extrême-droite.
Les semaines à venir, seront celles de la commémoration, d'une part des massacres du 7 octobre en territoire israélien et d'autre part de la mort de Samuel Paty. Nos élèves et certains personnels mobilisé·es sur les questions de racisme sont susceptibles de faire l'objet de vexations, punitions, sanctions, voire dénonciations à la police. Les collègues doivent absolument se rappeler les gardes à vues et arrestations de mineur·es à la suite de dénonciations au sein des établissements, et les multiples convocations au rectorat de collègues et camarades pour suspicion d’« atteinte aux valeurs de la République ».
Sud Éducation 93 invite dans les prochaines semaines à être d'autant plus vigilant·es : ne jamais laisser élèves et collègues seul·es ; s'interposer lors d'offensives de la hiérarchie, car en tant qu'adultes et éventuellement de syndiqué·es, on court moins de risques ; conseiller et accompagner ; faire remonter les situations au syndicat ou tout incident qui y serait lié. Et surtout, tenter d'empêcher les participations à ces signalements, qui sous couverts de lutte contre la radicalisation sont autant de signaux racistes envoyés à nos élèves et à leurs familles.
Continuons à porter un contre discours antiraciste clair dans les salles des personnels notamment. Un enseignement des années précédentes : mieux vaut se mobiliser rapidement et prévenir les situations, car les remontées systématiques de « faits laïcité » nominatifs au rectorat ainsi que les signalements au CIPDR (Comité Interministériel de Prévention de la Délinquance et de la Radicalisation) vont vite et peuvent avoir des conséquences dévastatrices.
Nous appelons l'ensemble des personnels, de tous les degrés, et plus particulièrement les titulaires moins exposé·es légalement à s'organiser pour protéger les premier·es concerné·es par la répression raciste et islamophobe.
Contre l'islamophobie, l'antisémitisme et tous les racismes, pour les libertés académiques et l'expression libre des élèves et leurs familles
SUD ÉDUCATION 93 REVENDIQUE :
- La suppression des équipes « Valeurs de la République » dans les différentes académies.
- Le boycott systématique des formations « Laïcité et valeurs de la République » imposées et instrumentalisées dans les écoles dans les écoles, collèges, lycées et établissements d'enseignement supérieur.
- Un véritable plan de lutte contre les racismes dont l'antisémitisme, avec une formation renforcée de tous les personnels sur leurs racines historiques et leurs manifestations contemporaines, ainsi que des dispositifs d'accompagnement des victimes.
- Le respect des libertés académiques et pédagogiques et le droit d'expression des élèves, familles et personnels sur les sujets ayant trait à la lutte contre les oppressions et le colonialisme.
- L'abrogation de toutes les mesures disciplinaires et judiciaires envers les élèves, familles et personnels se fondant sur le « non-respect de la laïcité » ou l'expression en faveur des peuples colonisés.
- L’abrogation de la loi de 2004 et la défense des droits des mères qui portent le foulard accompagnant les sorties scolaires, sous couvert de la circulaire Chatel et malgré un avis contraire du conseil d’État en 2013 et un avis du tribunal administratif de Nice en 2014.