Déclaration liminaire au Comité Social Administratif départemental spécial 2nd degré du vendredi 28 juin 2024
Monsieur le Directeur académique,
Mesdames et Messieurs les membres du CSASD,
Nous considérons être, en ce mois de juin, dans une situation exceptionnelle. La menace de l'arrivée au pouvoir de l'extrême-droite est considérable autant pour nos
élèves que pour les valeurs d’égalité et la possibilité d’émancipation que doit apporter l’école. Au vu de la dissolution de l'Assemblée nationale le 11 juin 2024, nous, FSU 93, CGT Éduc’action 93 et SUD éducation 93, considérons que les instances ne peuvent pas se tenir comme si la situation était normale.
Le projet de la Macronie pour l'éducation était déjà dénoncé par notre intersyndicale, les trois mois de très forte mobilisation pour le plan d'urgence dans la Seine-Saint- Denis en sont la preuve. Nous restons mobilisé∙es face à la fin de non-recevoir et au mépris de l’institution : le 93 a toujours besoin de 5 200 enseignant∙es, de 1 000 AED et AP, de 2 200 AESH, de 175 CPE, de 290 PsyEN, le 93 a toujours besoin aussi d’un collectif budgétaire pour le bâti scolaire… C’est nous qui sommes ancré∙es dans la réalité, ce sont les travailleurs et les travailleuses qui connaissent leur terrain et les élèves : ils et elles savent ce dont l’école a besoin en Seine-Saint-Denis !
Mais ces revendications se sont perdues dans le brouhaha médiatique orchestré par le président de la République, ce qui risque de permettre à l’extrême-droite et son projet destructeur, raciste, sexiste et classiste, d’arriver au pouvoir. Dans la continuité du macronisme qui lui a pavé la voie, l’extrême-droite vise à démolir les principes mêmes de l'école publique. Nous prenons nos responsabilités en dénonçant clairement le danger que fait courir la menace fasciste sur l’école, ses usager·es et l’ensemble du personnel qui y exerce.
En effet, le programme de l'extrême-droite veut renforcer le pouvoir de contrôle et de sanction des corps d'inspection. Ainsi, les enseignant·es et leurs pratiques, l'imposition de manuels et des programmes très restrictifs sont des projets que nous ne pouvons accepter. Les inégalités socio-scolaires en seraient renforcées également, alors que la réforme du « choc des savoirs » constitue déjà un virage vers la fin du collège unique, avec par exemple l'obtention du brevet comme condition à l'accès au lycée.
Par nature xénophobe et raciste, l'extrême-droite est un danger pour l'école publique, pour nos élèves et leurs familles, nos collègues et pour la démocratie, en prônant des politiques discriminatoires fondées sur le genre, l’origine, l’orientation sexuelle, le handicap. À rebours de ce que porte l'extrême-droite pour l'École, nous rappelons notre attachement au projet scolaire de l'école publique, laïque, gratuite et obligatoire. Nos revendications pour l'école publique, ses personnels, ses élèves, pour la société, ont une boussole : faire grandir et réussir tou·tes les élèves ensemble, permettre leur émancipation par les savoirs avec des personnels respecté·es et reconnus.
En tenant cette instance comme si de rien n’était, en entérinant des ajustements à la marge, le solde nul des variations d’emplois vie scolaire et quelques ouvertures et fermetures de classe, nous serions totalement déconnecté∙es de la réalité. Nous n’entendons pas laisser passer une marque de mépris supplémentaire de la part de l’Éducation nationale qui a joué l’euphémisation puis le pourrissement face à la mobilisation de l’ensemble de la communauté éducative et des élu·es du territoire pour un plan d’urgence pour l’éducation en Seine- Saint-Denis, contre le « choc des savoirs ». Le plan « L’État plus fort en Seine-Saint-Denis » s’est avéré très insuffisant et d’autres mesures présentées comme spécifiques s’inscrivent en réalité dans des dispositifs qui s’appliquent à l’ensemble du territoire national. À ce jour, il n’y a aucun investissement supplémentaire de l’Éducation nationale en Seine-Saint-Denis du fait de la spécificité départementale. À titre d’exemple, le poids de l’éducation prioritaire dans le département (60 % des écoles et des établissements) donne l’impression
d’un « surinvestissement » alors qu’il ne relève que de la norme. En outre, dans la perspective de la rentrée scolaire 2024 à l’ordre du jour de la séance, aucun effort n’a été consenti par la puissance publique sur les moyens d’assistance éducative ou encore sur les pôles psycho-santé-sociaux, malgré les engagements de la ministre Nicole Belloubet lors de l’audience ministérielle du 15 avril dernier. En alignant les poncifs sur son action dans le département depuis 2017, alors même que l’État est en faute tous les jours et qu’il dépense 2 600 euros de moins par élève en Seine-Saint-Denis que dans le reste du pays, le gouvernement méprise une fois de plus les besoins de la communauté éducative du département le plus jeune et le plus pauvre de France hexagonale.
Les fermetures de divisions en collèges annoncées à la hâte hier soir (Courbet à Pierrefitte, Sémard à Drancy, Sellier à Bondy) sont à ce titre scandaleuses, quelles qu’en soient les justifications. Et ce la veille d’un CSASD. Si cela s’explique par des départs vers le privé, c’est la continuation de l’échec retentissant de l’Etat à faire exister l’égalité territoriale et lutter contre la ségrégation. Les classes ont besoin d’être moins chargées, point final. Même si, après tout, il faut bien que l’Éducation nationale se hâte de rendre 682 M€ à Bercy…
Avant de quitter la séance, nous le répétons avec fermeté : il faut sans plus attendre abroger la réforme du « choc des savoirs », donner des moyens aux écoles, collèges et lycées partout en France et en particulier en Seine-Saint-Denis, et mettre toutes nos forces dans la bataille contre l’extrême-droite !