Communiqué de la Fédération SUD éducation
La rentrée scolaire a été l’occasion de rappeler à quel point l’école a besoin de moyens pour lutter contre les inégalités sociales, scolaires et territoriales. Alors que les réformes et les suppressions de postes abîment l’école publique, l’enseignement privé se développe et poursuit son entreprise de ségrégation sociale.
Le second degré public a connu 8000 suppressions de postes depuis 2017, c’est-à-dire l’équivalent de 160 collèges. Le manque de personnels dans le premier degré public ne permet pas de remplacer les absences des personnels. Les réformes successives de casse du service public, des réformes des lycées imposées par Blanquer au Choc des savoirs d’Attal, ce sont les écoles et les établissements scolaires des territoires les plus défavorisés qui paient le plus lourd tribut de cette politique. SUD éducation dénonce les inégalités territoriales et revendique une nouvelle politique ambitieuse pour l’éducation prioritaire.
Ainsi, alors que dans au moins 50% des établissements, il manque au moins un personnel à la rentrée, ce chiffre s’élève à 80% en Seine-Saint-Denis. De même, alors qu’en 2022, on compte 1,1% de personnels contractuels dans le premier degré et 9,1% dans le second degré, à Mayotte, ce chiffre s’élève à 52% dans le second degré, et en Seine-Saint-Denis, à 7,1% dans le premier degré. Excepté le concours exceptionnel dans le 1er degré dans certaines académies, le ministère de l’Éducation nationale n’a mis aucune véritable politique ambitieuse en place pour résoudre cette pénurie de personnels particulièrement aiguë dans les territoires les plus pauvres, les territoires où se concentrent les populations racisées et hors de France hexagonale.
Au contraire, en 2015, les lycées ont été sortis de la carte de l’éducation prioritaire, comme si les difficultés scolaires et sociales disparaissaient à l’entrée au lycée.
À défaut de garantir un même accès au service public d’éducation par un abondement de moyens dans les territoires les plus défavorisés, l’État et les collectivités territoriales subventionnent abondamment l’enseignement privé en lui consacrant 13,8 milliards d’euros en 2022, soit 75% de son budget. Pourtant, la publication des indices de position sociale (IPS) a montré que les établissements privés sont largement responsables du manque de mixité sociale dans les établissements publics : quand un collège favorisé est situé près d’un collège défavorisé, dans 85% des cas c’est un établissement privé. Le rapport Vannier-Weissberg a noté un embourgeoisement fort de l’enseignement privé depuis 2017, ainsi les établissements privés ont un IPS homogène. Dans l’enseignement privé catholique, les moyens du premier et du second degré sont fongibles, contrairement aux dotations publiques où le premier et le second degré constituent deux programmes budgétaires distincts. Ainsi l’enseignement privé catholique s’emploie à concentrer ses moyens dans le second degré, et particulièrement en lycée pour attirer les élèves les plus aisés mais aussi pour capter les bons élèves du public.
De ce fait, l’État finance la mise en concurrence de l’école publique et sa dégradation en payant pour garantir aux élèves des milieux favorisés l’entre-soi d’une scolarité ségréguée. 20% des élèves sont scolarisés en éducation prioritaire, 17% des élèves sont scolarisés dans l’enseignement privé : l’État a choisi de privilégier l’enseignement privé à l’éducation prioritaire.
Le rapport Vannier-Weissberg souligne par ailleurs une particularité française : un financement très important de l’école privée par l’argent public avec très peu de contrôle. Ainsi il semble que les entorses à la liberté de conscience, à la laïcité, aux politiques ministérielles, soient courantes dans l’enseignement privé.
De même le rapport souligne une entorse à la loi Debré qui contrevient au principe de laïcité : l’État entretient en effet une relation privilégiée avec le SGEC (Secrétariat général de l’enseignement catholique) dont le secrétaire général est nommé par la Conférence des évêques de France. Depuis la loi de 1905, l’État “ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte” or ici l’État entretient un dialogue de gestion, non pas avec chaque établissement privé par le biais des rectorats comme cela est prévu par la loi Debré, mais avec un réseau d’enseignement catholique nommé par le pouvoir clérical. On parle d’une “confessionnalisation” de la relation entre l’État et les établissements privés.
À SUD éducation, on considère que cette pratique aggrave l’atteinte à la laïcité que constitue déjà le financement de l’enseignement privé par l’argent public.
SUD éducation revendique une véritable politique de lutte contre les inégalités sociales, scolaires et territoriales par :
- l’arrêt du financement public de l’enseignement privé ;
- la nationalisation de l’enseignement privé, sans indemnité ni rachat, et le transfert de ses personnels dans les corps correspondants de l’enseignement public ;
- la refonte de la carte de l’éducation prioritaire et le retour des lycées ;
- l’augmentation et la redéfinition des moyens de l’éducation prioritaire.